Les envers de la métropolisation
Les ruelles de Hô Chi Minh Ville, Vietnam

Marie Gibert-Flutre, CNRS EDITION, 2019

Tours, grands projets immobiliers, multiplication de shopping malls et nouvelles infrastructures de transport sont autant de symboles de la métropolisation accélérée de Hô Chí Minh Ville aujourd’hui. Cette métropole de près de 12 millions d’habitants est entrée dans « l’ère de la grande dimension », redéfinissant alors l’espace public de la cité, ses pratiques et ses conceptions.

Cependant, à rebours de sa progressive verticalisation, c’est le long de ruelles (hẻm) que vit 85 % de la population de la ville. Les ruelles demeurent la scène de l’ordinaire urbain. Une scène avec ses codes, ses rythmes propres et la diversité de ses acteurs. Outre la forme particulière que ces quartiers très denses impriment à la ville, les ruelles constituent des espaces vécus au sens fort. À l’interface entre le public et le privé, entre le collectif et l’individuel, une culture spatiale spécifique s’y développe, associant des activités extrêmement diverses et des lieux de sociabilité foisonnants. Les ruelles constituent alors autant de fenêtres ouvertes sur la petite mécanique métropolitaine vietnamienne du quotidien. Les mutations y sont moins spectaculaires – y compris au sens littéral de leur mise en spectacle –, mais tout aussi profondes et révélatrices des transformations de la société vietnamienne et de sa quête de « modernité » dans un pays au régime politique autoritaire.

Pour saisir le fonctionnement quotidien de ces « envers métropolitains », Marie Gibert- Flutre articule l’étude de leur morphologie et de leur gestion politique avec celle des pratiques sociales qui s’y déploient et des temporalités qui les structurent, à partir de l’étude de six quartiers de ruelles. Cette étude magistrale, à la croisée de la géographie, de l’anthropologie urbaine et de l’urbanisme, renouvelle et élargit en particulier la notion d’« espace public » – historiquement issue de la pensée urbaine occidentale – par sa confrontation avec le terrain vietnamien.

Cet ouvrage est tiré d’une thèse qui a reçu le Grand Prix de thèse sur la ville PUCA APERAU (2015) et le Prix de thèse du GIS Asie (2016).