Implications et engagements globalisés

16 – 18 rue Suger
Paris 6° (RER Saint-Michel)
En partenariat avec le CRPMS
Mardi 04 février 2020 de 11h à 13h

Dettes de sexe ?

Catherine Deschamps

Comment le triptyque de Marcel Mauss, « Donner, recevoir, rendre » s’applique à l’analyse de la sexualité ? De quoi est faite la phase de dette située entre le temps du don et le temps du contre-don ? Il s’agit de sortir la sexualité de son isolat, dans une certaine mesure aussi de l’aborder au-delà des relations affectives et économiques qu’elle entraîne, pour saisir son imbrication avec différents contextes d’intimités. Il arrive alors parfois que des formes de sexualisation de l’intimité ne comprennent aucunes formes de relations sexuelles.

Catherine Deschamps est anthropologue. Professeure à l’Ecole nationale supérieure d’architecture de Nancy, elle est membre du LHAC et associée au Sophiapol/Lasco (Université Paris Nanterre). Ses travaux portent essentiellement sur les minorités sexuelles et le VIH, et sur le genre dans les espaces publics parisiens. Avec Christophe Broqua, elle a dirigé un recueil d’articles critiques sur la pensée de Paola Tabet (L’échange économico-sexuel, 2014, éditions de l’EHESS). Avec ce même chercheur et également Philippe Combessie et Vincent Rubio, elle vient de coordonner un dossier du Journal des anthropologues qui s’inscrit dans la continuité (JDA : Dettes de sexe ?, n°156-157, 2019).

Argumentaire du séminaire

Ce séminaire propose de repenser les dialogues et les mises à l’épreuve réciproques entre anthropologie et psychanalyse. Il s’efforce d’articuler trois lignes de questionnement :

• Clinique du terrain et terrains cliniques : des anthropologues s’interrogent sur la nature des relations interpersonnelles développées durant leurs enquêtes, le sens et les modalités de leur écoute, et, corollairement, les mobiles intimes de la parole des acteurs. Les crises économiques et politiques qui bouleversent de nombreuses sociétés s’impriment, en effet, dans la situation ethnologique. De surcroît, l’ethnologue se trouve de plus en plus fréquemment en contact avec des populations en fragilisation croissante, en état de non inscription, et même d’errance.

• Folie et État : on développera une réflexion croisée, d’un côté sur les effets sur les élaborations identitaires des nouvelles représentations du bien-être psychique, de l’autre, sur les instances de légitimation sur ce que serait une bonne santé psychique en termes de prévention, de diagnostic, de traitement et de leur évaluation. Enfin, le lien doit être souligné entre les terreurs issues de la violence de l’État et les confusions des registres du Réel, de l’Imaginaire et du Symbolique, qui font tenir l’existence singulière et les échanges sociaux. D’une certaine manière, la folie a disparu au profit de l’exclusion et de la stigmatisation des perdants.

Dans les pays lointains qui ne rentrent pas dans cette industrialisation du soin, l’OMS., au contraire, préconise un retour aux dispositifs dits « traditionnels », légitimant médiums, devins et autres guérisseurs. Dans ces deux configurations du monde globalisé, les États jouent un rôle majeur, idéologique, symbolique, mais aussi institutionnalisant les corps des professionnels du soin psychique. La psychanalyse fait actuellement l’objet d’un débat social, d’autant plus aigu que c’est la singularité du sujet individuel qui est en jeu. La présence de la psychanalyse dans les institutions de soin et d’enseignement redevient l’enjeu d’une lutte, alors que la psychiatrie et la psychopathologie sont de plus en plus biologiques.

• Un dernier volet : rouvrir le débat entre anthropologie et psychanalyse de l’ordre épistémique et épistémologique, à l’heure où le cognitivisme est, pour un nombre croissant d’anthropologues, un outil de validation de leurs recherches et de leurs résultats. La généralisation de l’économie de marché a eu des effets de plus en plus prononcés sur les définitions de la souffrance psychique, des troubles mentaux, leurs modes de diagnostic et leur traitement. Dans les démocraties industrielles, on constate la dominance des modélisations biologiques et neurologiques, le retour à un primat héréditaire et la mise en avant de polices de rééducation comportementaliste.

Séminaire mensuel organisé par :

Olivier Douville, psychanalyste, Laboratoire CRPMS Université Paris 7, douvilleolivier@noos.fr
Nicole Khouri , sociologue, IMAF khouri.n@wanadoo.fr
Julie Peghini, anthropoloque, Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université Paris 8, Laboratoire CEMTI, julie.peghini@univ-paris8.fr
Monique Selim, anthropologue, directrice de recherche émérite à l’IRD CESSMA monique.selim@ird.fr

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