Ressources, marchés, dettes

Atelier organisé par l’axe « Marchandisation et émancipation : de la question sociale à la question environnementale » du CESSMA

26 septembre (14h-17h30) et 27 septembre 2023 (9h30-17h30)
Salle 209 – Bâtiment Olympes de Gouges, Université Paris Cité

L’atelier a pour objectif d’interroger, à partir de recherches de terrain, le rôle de la monnaie, de la dette et de la finance, ou encore du marché, dans la reconfiguration des rapports sociaux, avec une attention particulière sur l’évolution des inégalités et des relations de domination. Il s’agit d’un « atelier » au sens d’un partage de travaux en cours, non aboutis, visant à stimuler nos recherches individuelles et la réflexion collective.
Depuis les années 1980, la question sociale a été entièrement remodelée par la logique néolibérale qui sous-tend les politiques de développement et de lutte contre la pauvreté. En faisant de l’insertion dans le marché globalisé et financiarisé leur pierre angulaire, celles-ci ont tendanciellement opéré un déplacement : l’amélioration de l’accès aux services financiers était supposée pallier le problème de l’accès à l’emploi ; la gestion des risques sur le marché prenait le pas sur l’institution de solidarités collectives. La question sociale est aujourd’hui de plus en plus transformée par la question environnementale qui touche les modes d’accès aux ressources, la constitution des revenus, l’exposition aux risques naturels. Là encore, le marché est présenté comme réponse possible aux usages supposés déficients et non optimaux des ressources naturelles. La marchandisation s’accompagne d’un processus de financiarisation – c’est-à-dire la transformation en actif financier – d’un pan toujours plus vaste de ressources (la terre mais aussi les écosystèmes, le risque climatique, etc.), de biens communs et publics (comme la santé ou l’éducation) et de personnes (les « pauvres » sont désormais une cible désormais privilégiée des investissements « à impact »).
On s’intéressera tout particulièrement aux stratégies ambivalentes des acteurs pour s’émanciper par le marché ou s’émanciper vis-à-vis du marché. Comment ces marchés s’articulent-ils par ailleurs avec différentes formes de solidarité et de protection, qu’elles soient construites ou héritées, institutionnalisées ou interpersonnelles ?
Les questions liées aux formes de parenté, au genre et à la sexualité constituera un fil directeur de la réflexion. Les marchés, quels qu’ils soient, sont à la fois façonnés et façonnent en retour les rapports de genre (tout en étant constamment articulés avec d’autres formes d’appartenances sociales et de domination). Dans quelles mesures la construction de nouveaux marchés ou leur reconfiguration s’adossent ou au contraire contestent ou renouvellent les pratiques et les normes de parenté (modalités d’alliances, pratiques cérémonielle, contours des organisations domestiques et des solidarités familiales) et de sexualité (emprise sur les corps, définition des sexualités jugées respectables ou au contraire déviantes) ? Inversement, comment la contestation du marché et les tentatives d’émancipation et leurs définitions multiples se nourrissent des pratiques et des normes de parenté et de sexualité ou les reconfigurent ? Ce sont les modalités de cet entremêlement entre économie, parenté et sexualité et leurs ancrages dans différents contextes sociaux, politiques et historiques qui nous intéressent.
Les modalités de la monnaie, de la dette et de la finance sont constituées par les inégalités, à différentes échelles, et constitutives de ces inégalités. Dans un contexte d’endettement croissant ou persistant des familles, des entreprises comme des États, l’accès inégal à la dette et au crédit (prix, sanctions en cas de défaut) et l’instabilité monétaire creusent les inégalités et contraignent les politiques publiques et le débat démocratique.